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Nouvelles

Feux de forêt et économie régionale

 

 

La forêt de l’Abitibi-Témiscamingue et du Nord du Québec toujours pérenne?

 

Cet été, les feux de forêt de l’Abitibi-Témiscamingue et du Nord du Québec nous ont démontré que la nature est bien plus forte que n’importe quelle planification stratégique pour la gestion de cette ressource naturelle, heureusement pour nous, renouvelable.

Dans l’article de Louis Pelletier, ing.f. Forestier en Chef  (LeSoleil 22 juin 2023), celui-ci répond essentiellement à 4 questions :

Est-ce que les possibilités forestières actuelles (2023-2028) tiennent encore la route compte tenu de l’importance des feux de forêt?  Réaliser une nouvelle évaluation forestière pour déterminer ce que la forêt aura la capacité d’offrir sur le plan de la production de bois à la suite du passage de ces feux.  Plusieurs facteurs vont déterminer cette capacité, des facteurs d’influences tels que la cartographie précise des territoires affectés par les feux, quels peuplements sont affectés, leur maturité, voir le détail des plans de récupération des bois brulés, etc.

Avions-nous prévu des feux d’une telle importance? Nous nous attendions à une recrudescence des feux de forêt.

Est-ce que nos calculs de possibilités forestières intègrent les risques liés aux feux de forêt?  Le calcul des possibilités forestières intègre les feux passés sous la forme de mise à jour de la forêt. L’approche actuelle vise davantage à établir ces précautions là où les feux ont été les plus fréquents dans le passé.

Est-ce que nos choix d’aménagement sont appropriés face à la récurrence des feux? Plusieurs considérations actuelles méritent d’être revues afin de les adapter aux défis des changements climatiques.

Nous ne résoudrons pas tous les défis soulevés par les résultats de la modélisation, mais notre intention est de mettre en place et d’offrir des outils d’aide à la décision afin de diminuer les risques associés aux changements climatiques sur nos forêts.

La santé et la résilience de notre forêt et de notre biodiversité doivent être au centre de nos préoccupations.

Nous voilà donc devant une situation où les prévisions devront aussi inclurent l’imprévisible et permettent aux entrepreneurs forestiers d’anticiper les changements dans leur industrie.

Aujourd’hui, que représentent ces entrepreneurs forestiers du Québec?

Dans un article du site internet de « Opérations forestières du 13 avril 2023, on retrouve certaines statistiques issues d’une étude faite par M. Louis Dupuis. 

Voir article original ICI

  • +/- 500 entrepreneurs forestiers actifs au Québec
  • +/- 3500 emplois directs incluant les dirigeants opérants
  • +/- 1500 machineries forestières en opération
  • +/- 850 M$ les revenus annuels générés directs
  • +/- 280 M$ la masse salariale incluant les retenues à la source et les contributions de l’employeur

 

L’étude nous révèle que l’âge moyen de fondation de ces entreprises est de 22 ans, avec la médiane de l’année de fondation en 1994.

En outre, selon notre estimation non scientifique, il devait y avoir au Québec de 1000 à 1200 entrepreneurs forestiers au milieu des années 1990. Il n’en resterait aujourd’hui qu’en environ 500, ce qui est extrêmement préoccupant pour l’avenir de l’industrie forestière.

Est-ce que ces entrepreneurs peuvent encore générer des bénéfices?

Dans un billet du 11 février 2021 par l’Étoile du Lac, le même auteur nous indiquait que le prix du bois d’œuvre a beau atteindre des sommets, les entrepreneurs en récolte forestière n’en profitent pas. Pire, les prix offerts stagnent depuis plus d’une vingtaine d’années.  Pour lui, la situation est intenable.

« Au milieu des années 90, le prix offert aux entrepreneurs forestiers était environ 18 $ du mètre cube. Aujourd’hui, bien qu’il y ait eu certains ajustements plutôt timides, on est toujours aux environs de 18 $ du mètre cube. Les coûts d’opération des entrepreneurs, eux, ont explosé », explique-t-il.

Également de L’étoile du lac, le 22 mai 2022 par Serge Tremblay :  L’indice pondéré de la variation des coûts des entrepreneurs forestiers du Québec (IPVCEFQ) mis au point par Louis Dupuis et clair :  il en coute 147,5% de plus de ce qu’il en coutait en 2011 pour exploiter une entreprise de récolte forestière.  Avec des prix au mètre cube qui ont à peine bougé depuis, pas étonnant que des entrepreneurs préfèrent quitter le navire.

Devant l’urgence et la « panique des feux de forêt » le 5 juillet dernier, le gouvernement du Québec a fait l’annonce d’une aide de 50 millions de dollars pour les entreprises touchées par les feux de forêt, sous la forme de prêts ou de garanties de prêts.

L’accueil de cette annonce est peu positif chez certaines entreprises concernées, voyant poindre des pertes financières et matérielles considérables.

LeQuotidien 10 juillet 2023 par Guillaume Roy recueille un témoignage dans son article :

« Ça ne répond pas du tout à mes besoins en tant qu’entrepreneur général ni aux besoins des entreprises qui travaillent pour la coopérative, lance d’emblée Stéphane Gagnon, le directeur général de la Coopérative forestière de Girardville, qui travaille avec une quarantaine d’entreprises forestières ». 

La récolte de bois brûlé (bois de perturbation) n’est pas encore débutée que les entrepreneurs forestiers anticipent déjà que ces travaux engendreront des dépenses telles que les frais d’entretien d’équipement / machinerie (filtres à air, lubrifiant, lames, masques, et plus). Peuvent-ils prétendre à un dédommagement équitable?

Anticipant une période difficile, certains d’entre eux planifient déjà de réorienter leurs opérations afin d’explorer de nouveaux créneaux, tels que le reboisement. 

Quel sera l’impact économique direct et indirect sur les régions affectées? 

Outre la foresterie, combien d’entreprises touchées directement ont dû suspendre leurs opérations pendant ces feux? 

Quelles sont leurs pertes financières immédiates, à moyen et à long terme?

La compréhension des créanciers sera-t-elle au rendez-vous?

Quelles sont les chances de récupérer un jour les acquis financiers partis en fumée?

Personne ne peut gager sur l’avenir de la foresterie. Nous risquons fort d’assister, dans un proche avenir, à l’émergence de modèles d’affaires bien différents.

Malheureusement, la conclusion économique de ce cycle naturel devra se faire attendre encore quelques années. Nous pourrons alors faire état de la résilience du secteur forestier qui renaitra de ses cendres.

 

  • Jean-Yves Poitras, commissaire industriel